1 Le contexte et les spécificités des démarches qualité en EMS
Les évaluations internes et externes sont des activités à caractère réglementaire (et donc obligatoire) comme l’est la nécessité d’engager des démarches qualité dans les établissements sociaux et médicosociaux (EMS). Avant d’aborder une explication des principes relatifs aux évaluations dans ces établissements, il est utile de rappeler le contexte des démarches qualité dans ces milieux particuliers.
La qualité dans les établissements sociaux et médicosociaux s’inscrit dans une organisation de production de services qui, par nature, est plus complexe qu’une organisation de production de biens matériels. De plus, les clients des établissements sociaux et médicosociaux sont des personnes difficiles (vieillissantes, malades, démentes, handicapées, en difficulté sociale, etc.). Ajoutons à cela une tradition de la communication orale et un refus de la mesure de la performance inhérent aux métiers à caractère social ou culturel et vous aurez tous les ingrédients qui perturbent la mise en œuvre des principes générant la qualité et la performance dans ces organisations.
En revanche, les établissements sociaux et médicosociaux présentent un élément éminemment profitable à la qualité qui est le sens élevé de leurs activités. Les associations et les projets associatifs qui sont à l’origine de la naissance de la plupart de ces établissements et les valeurs qu’elles affichent sont des aides puissantes à la mise en place de démarche qualité et l’on peut s’appuyer bien évidemment dessus.
La difficulté est de prendre en compte l’aspect économique de l’organisation comme le fait naturellement une entreprise qui vend des produits ou des services ordinaires à des clients ordinaires. Elle fonctionne avec l’argent qu’elle a gagné par la vente des produits ou des prestations sans se poser de question métaphysique sur le manque de moyens ou sur la mauvaise qualité des prestations rendues.
Dans les établissements sociaux et médicosociaux, il faut apprendre à faire avec ce que l’on a ; ce qui n’empêche pas, bien au contraire, de se battre pour avoir un peu plus de moyens et d’aller en chercher là où il y en a encore, du côté des partenaires institutionnels ou de mécènes ou de bienfaiteurs si cela existe.
La qualité, c’est aussi tirer le meilleur parti des ressources dont on dispose pour apporter la meilleure prestation possible ; et cette capacité à travailler dans ce sens est en général ce qui distingue une organisation performante d’une qui ne l’est pas. Une démarche qualité ne consiste pas à travailler comme d’habitude sans se poser de question et en réclamant des moyens supplémentaires sans faire l’effort d’améliorer en même temps la performance interne et externe de l’organisation.
Il est absolument indispensable dans ces milieux complexes et difficiles que la qualité ne soit pas considérée uniquement à travers les décrets qui sont essentiellement des prétextes et des obligations à agir. Le management et la qualité ne s’apprennent pas à coup de décrets. Il faut donc, ce que font les managers efficaces, changer la culture des établissements sociaux et médicosociaux d’abord (ou en même temps) avant de commencer à mettre en place des dispositions. Combien de fois entendons-nous des phrases du genre :
« Nous n’avons pas encore engagé de démarche qualité car nous n’avons pas encore écrit toutes nos procédures » (ou des bêtises dans ce genre).
Les établissements sociaux et médicosociaux ont des atouts que n’avaient ou n’ont pas les organismes classiques de service ou de production (les valeurs, une haute idée des missions, etc.) ; il faut profiter de ces avantages, appuyer les démarches qualité sur ces éléments et ne pas considérer ces projets comme des contraintes, même si dans un premier temps ils demandent un investissement important. À terme, tout le monde sera gagnant, y compris les personnels et en particulier ceux qui croient à leur utilité sociale et qui pensent qu’il faut que chacun apporte sa petite pierre à l’édifice sociétal. La pénibilité physique des travaux tend à diminuer avec l’apport de la technologie et la pénibilité mentale diminuera avec des modes de management respectueux et motivants. Des individus qui sont mis au placard souffrent certainement plus de l’absence de travail et de responsabilité que d’autres qui s’activent toute la journée mais qui savent que cette activité est utile pour les clients et en conséquence la société.
Le contexte des établissements sociaux et médicosociaux est difficile (comme d’autres contextes d’ailleurs) en raison de la baisse des moyens. La crise en est à l’origine mais il y a fort à craindre que la fuite de nos savoir-faire vers les pays émergents sonne la fin de l’opulence et qu’il faille hélas se préparer à travailler dans un contexte généralisé de pénurie. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, une démarche qualité qui mobilise les énergies et qui aide à s’organiser au juste nécessaire est une réponse à cet état de fait. La qualité n’est pas synonyme de richesse et de coûts supplémentaires. Les industries de productions l’ont découvert il y a quelques dizaines d’année avec le zéro défaut et la recherche de l’excellence.
Une petite automobile aujourd’hui coûte moins de six mois d’un petit salaire et c’est un objet fiable, capable de durer quelques années sans problème majeur pour peu qu’elle soit tenue en état et conduite avec modération. Si nous remontons quarante ans en arrière, c’était différent et peu de ménages pouvaient s’offrir une automobile. Ce secteur a su baisser les coûts de production par une organisation du travail et par des technologies de production automatisées. Même si le secteur médicosocial ne profitera pas autant des avancées de la technologie car la main-d’œuvre gardera une place importante dans la prestation fournie, l’organisation peut avoir un effet majeur sur ses performances.
Fédération des associations régionales du Mouvement français de la qualité. Dans presque toutes les régions, un MFQ (hébergé très souvent dans une CCI ou une CRCI) assure la promotion du management de la qualité, de la santé et sécurité au travail, de la préservation de l’environnement, du développement durable, de l’excellence à travers des activités auxquelles participent les adhérents. On y trouve notamment des clubs d’auditeurs internes croisés qui pratiquent l’échange d’audits et d’évaluation. Ces échanges sont générateurs de transversalité et de bonnes pratiques.
Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médicosociaux. Créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, l’ANESM est née de la volonté des pouvoirs publics d’accompagner les établissements et services sociaux et médicosociaux (ESSMS) dans la mise en œuvre de l’évaluation interne et externe, instituée par la loi du 2 janvier 2002. Ses deux missions sont de valider, élaborer ou actualiser des procédures, des références et des recommandations de bonnes pratiques professionnelles et les diffuser et d’habiliter les organismes extérieurs qui procèdent à l’évaluation externe des activités et de la qualité des prestations des EMS.