1 Les débuts de l’analyse de la valeur
C’est aux États-Unis, à la General Electric, vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, que Lawrence Miles, alors ingénieur au département achats, confronté à certaines pénuries d’approvisionnement, fait part de trois observations :
1. Si les bureaux d’études sont informés des coûts des solutions qu’ils choisissent, par exemple le prix des matières premières, des produits semi-ouvrés, des fournitures diverses, les coûts des procédés de fabrication, etc. : statistiquement il est possible de réaliser une économie de l’ordre de 5 % sans procéder à d’autres actions de réduction de coûts, les critères de choix n’étant plus uniquement techniques.
2. Si, pendant les principales étapes de la conception, le bureau d’études prend l’avis des autres services de l’entreprise concernés par le développement du produit : approvisionnements, méthodes, production, qualité, après-vente, l’économie peut atteindre 10 %.
3. Si l’on remet en cause les principes de conception habituels, lorsqu’il est nécessaire de modifier un produit en vue de le simplifier en ne se contentant pas de modifications de détail mais en cherchant de nouveaux principes constructifs, les économies réalisées peuvent être considérables et atteindre alors 20 à 40 %.
A partir de ces constatations, Milles propose une nouvelle démarche de conception économique appelée value analysis, traduite en français par « analyse de la valeur ».
Dès 1945, la méthode se généralise au sein de la General Electric et est adoptée par d’autres industriels américains. Dans les années 60, le ministère de la défense américain, en la personne de Mac Namara, qui cherche à faire des économies sur les achats des matériels militaires, décide d’inclure dans les contrats passés par le ministère des clauses faisant obligation aux industriels d’appliquer l’analyse de la valeur à partir d’un certain montant de fourniture. Cette démarche prend le nom de Purchase Analysis qui s’inspire grandement des principes de l’analyse de la valeur.
En plus des objectifs économiques, les contrats comportent également des clauses d’intéressement sur les résultats obtenus pour inciter les industriels à suivre les nouvelles procédures.
Comme le Département de la Défense (DOD) est le client le plus important des États-Unis, toutes les entreprises travaillant pour lui appliquent la méthode et un certain nombre d’industriels produisant des biens de consommation suivent l’exemple. Cela contribue grandement à son développement dans le tissu industriel du pays.
Dès 1975, un millier d’entreprises américaines ont des représentants à la Society of American Value Engineers (SAVE) créée en 1959, réunissant les ingénieurs et techniciens chargés de pratiquer la méthode. En 1980, la SAVE compte plusieurs milliers de membres à titre individuel ou collectif.
N’étant pas protégée par le « secret défense », la méthode gagne les pays en relation économique ou industrielle avec les États-Unis. Pour certains, grâce à l’implantation sur leur territoire de filiales américaines, pour d’autres en raison d’accords de production sous licence