1 Les spécificités des projets spatiaux
La mise en œuvre de l’ISO 9001 dans le secteur spatial a permis d’agréger les nombreuses actions « d’assurance produit » déjà entreprises depuis la naissance même de ce secteur. Il est à noter que le terme « d’assurance produit » (AP) est né de la fédération de l’assurance de la qualité (AQ) et de la sûreté de fonctionnement (SdF). Cette dernière regroupe la fiabilité, la sécurité, la maintenabilité et la disponibilité des systèmes.
Sous le simple effet d’un besoin évident dans le secteur spatial, le domaine de l’AP était déjà en grande partie couvert avant l’apparition de l’ancêtre de la norme actuelle, la version 1987.
En effet, les projets spatiaux sont complexes. Ils ont une durée de développement longue (jusqu’à une douzaine d’années pour un nouveau lanceur de satellites tel qu’Ariane 5). Ils font appel à des technologies avancées. Leur financement nécessite la contribution de nombreux États en Europe. Les intervenants sont donc de cultures différentes avec des schémas de pensée personnalisés. Tous les projets demandent un très haut niveau de SdF.
L’approche processus du modèle ISO 9001 a permis de fédérer les actions qualité et fiabilité existantes, certes efficaces mais souvent séparées, en un véritable système de management de la qualité (SMQ) où tout devient fonctionnellement cohérent. De nos jours, beaucoup d’entreprises du secteur disposent d’un système dit « QSE 1 intégré ». C’est-à-dire qu’en plus de l’AQ, l’hygiène et la sécurité au travail (modèles BS OHSAS 18001:1999 ou ILO-OSH 2001) ainsi que la composante environnementale et sociétale (régie par la norme NF EN ISO 14001 en lien avec les recommandations de la NF ISO 26000) sont traitées dans la même démarche.
Enfin, le QSE tend à devenir un système de management étendu à toute l’entreprise. Il se transforme progressivement en un système de management « tout court » (SM). L’ISO 9001 devient alors le modèle d’inspiration. Elle est la racine même des bonnes pratiques.
Une loi française sur les opérations spatiales (LOS) a vu le jour en 2008. Les décrets d’application demandent un processus de certification des engins spatiaux quittant le sol français (autorisation de lancement pour chaque vol, licence pour un type de lanceur). Cette loi renforce l’obligation de la gouvernance des programmes et des entreprises par les processus.
Le présent article est donc centré sur le retour d’expérience (REX) de la mise en œuvre, depuis près de dix ans, de la norme NF EN ISO 9001:2008 dans le management des projets spatiaux européens.
Au moment où cet article est écrit, une nouvelle version de l’ISO 9001 entre en vigueur : la norme NF EN ISO 9001:2015. Il faut savoir que certaines exigences issues de cette nouvelle version ont déjà été mises en œuvre par anticipation dans le secteur spatial : celles-ci sont développées en fin d’article, au paragraphe 7.